Inauguration de la maquette du JWST grandeur nature à la Cité de l’Espace

 
Le télescope spatial James Webb (JWST) est, sans conteste, un instrument scientifique hors du commun. Depuis son lancement le 25 décembre 2021 depuis Kourou en Guyane française, il a déjà révolutionné l’astrophysique, en apportant des réponses à de nombreuses énigmes tout en soulevant de nouvelles questions. Si l’Univers se dévoile ainsi aux chercheurs, c’est en grande partie grâce à l’immense miroir de 6,5 m de diamètre, qui fait du James Webb le télescope spatial le plus grand et le plus sophistiqué jamais lancé.
 
Mais comment visualiser au plus juste ce télescope, presqu’aussi élevé qu’un immeuble de trois étages ? C’est précisément l’expérience proposée au public par la Cité de l’Espace avec une reconstitution grandeur nature. L’inauguration de cette maquette s’est tenue le 28 avril 2025, en présence notamment de Pierre-Olivier Lagage, directeur de recherche au Département d’Astrophysique du CEA, de Lucie Leboulleux, chargée de recherche à l’IPAG/CNRS, et d’Olivier Berné, directeur de recherche à l’IRAP/OMP/CNRS.

Une maquette unique en Europe !

Christophe Chaffardon, Directeur de l’Éducation, des Sciences et de la Culture à la Cité de l’Espace, retrace l’épopée de la maquette grandeur nature du miroir du télescope spatial James Webb, lors de son inauguration dans les jardins de la Cité de l’Espace.
Crédits :
Raphael de Assis Peralta

Unique en Europe, cette maquette à l’échelle 1 n’a qu’une seule jumelle : aux États-Unis. La reproduction toulousaine a été rendue possible grâce au don du Département d’Astrophysique du CEA Paris-Saclay, qui a fourni une maquette grandeur nature réalisée en 2009 à l’occasion de l’Année mondiale de l’astronomie. Le CEA a joué un rôle clé dans la conception du JWST, en participant notamment au développement de l’un de ses instruments majeurs : l’imageur MIRIm (Mid-InfraRed Imager), dont Pierre-Olivier Lagage était le responsable scientifique.

 

Très prochainement, la Cité de l’Espace matérialisera au sol la surface du bouclier thermique du télescope, équivalente à celle d’un terrain de tennis. Ce bouclier protège le JWST du rayonnement thermique du Soleil, condition indispensable pour maintenir les instruments dans une température extrêmement basse, nécessaire à l’observation dans l’infrarouge.

Une table ronde inaugurale s’est tenue autour de l’aventure extraordinaire du télescope spatial James Webb et de ses dernières découvertes scientifiques, en présence de (gauche à droite) Pierre-Olivier Lagage, Lucie Leboulleux, Christophe Chaffardon et Olivier Berné.
Crédits :
Raphael de Assis Peralta

Installée à proximité de la réplique de la fusée Ariane 5, la maquette offre une occasion unique de prendre la mesure de l’envergure de l’instrument qui était plié dans la fusée : c’est en effet le lanceur européen de l’ESA qui a placé le télescope sur son orbite, avec une précision remarquable : un tir si précis qu’il a permis de doubler l’espérance de vie du télescope, passant de 10 à 20 ans.

 

En complément, la Cité de l’Espace propose le film IMAX® 2D Deep Sky : l’aventure du télescope JWST, projeté sur écran géant. Le public est plongé dans l’épopée fascinante du James Webb : revivez son décollage à bord d’Ariane 5 et embarquez pour un voyage vertigineux aux confins de l’Univers et du temps. Grâce aux images spectaculaires fournies par l’observatoire spatial, l’expérience devient une véritable immersion cosmique.

Projection du film IMAX® “Deep Sky, l’aventure du télescope James Webb” à la Cité de l’Espace.
Crédits : Pierre Carton – Cité de l’espace

TRAPPIST-1 b a t-elle finalement une atmosphère ?

 
Le système TRAPPIST-1, fascinant par ses sept planètes rocheuses de taille terrestre, dont trois situées dans la zone habitable, représente une opportunité unique pour étudier les atmosphères des exoplanètes. Le télescope spatial James Webb (JWST) joue un rôle clé en permettant de mesurer l’émission thermique de ces planètes tempérées. Une première campagne d’observation à λ=15 µm avait révélé une température de 503 K sur le côté jour de la planète TRAPPIST-1 b, suggérant l’absence d’atmosphère et une surface très sombre. Cependant, basée sur les observations d’une seconde campagne à λ=12,8 µm, cette nouvelle étude menée par le Département d’Astrophysique de l’IRFU du CEA Paris-Saclay a mesuré une température bien plus basse que celle attendue par le scénario précédent, obligeant ainsi les chercheurs à explorer de nouvelles pistes. Parmi les hypothèses envisagées, une atmosphère riche en CO2 et en brumes est une possibilité, bien qu’un scénario de surface ultramafique volcanique semble plus probable. Pour résoudre ce mystère, une nouvelle phase d’observations a été lancée, visant à suivre le flux lumineux de la planète tout au long de son orbite.

 

Ce résultat a été publié dans la prestigieuse revue Nature Astronomy : « Combined analysis of the 12.8 and 15 μm JWST/MIRI eclipse observations of TRAPPIST-1 b »
 

TRAPPIST-1 : un laboratoire idéal pour étudier les atmosphères des planètes rocheuses

Figure 2 – En comparant le flux lumineux de l’étoile seule lorsque la planète est occultée (derrière l’étoile) avec le flux observé juste avant ou après l’occultation, il est possible de déduire l’émission thermique du côté jour de la planète, tout en évitant les contaminations stellaires présentes dans d’autres configurations (par exemple, les transits).
Crédit : Ducrot et al. 2024

Le système TRAPPIST-1 se distingue par son étoile naine ultrafroide entourée de sept planètes rocheuses de taille terrestre, dont trois situées dans la zone habitable, offrant ainsi une opportunité scientifique exceptionnelle pour l’étude des exoplanètes et des atmosphères. Ce système constitue donc une cible privilégiée pour le télescope spatial James Webb (JWST), dont les capacités spectroscopiques infrarouges permettent d’étudier en détail ce type de planètes. En particulier, le JWST est capable de mesurer directement la chaleur émise par une planète, en comparant le flux lumineux de l’étoile lors d’une occultation – moment où la planète passe derrière l’étoile – au flux observé juste avant et après cet événement (cf. Figure 2). Cette méthode permet de déduire la lumière infrarouge émise par la face éclairée (côté jour) de la planète tout en évitant les contaminations stellaires qui peuvent compliquer les mesures dans d’autres configurations, telles que les transits.

 

« L’émission thermique est rapidement devenue la méthode préférée pour étudier les exoplanètes rocheuses autour d’étoiles naines M durant les deux premières années du JWST », explique Pierre-Olivier Lagage, co-auteur principal de l’étude et directeur du Département d’Astrophysique au CEA. « Concernant les planètes de TRAPPIST-1, les premières informations proviennent des mesures d’émission, car il reste difficile de distinguer les signaux atmosphériques et stellaires en transit. »

Deux campagnes d’observation avec le JWST ont été menées pour étudier la planète TRAPPIST-1 b car, étant la plus proche de l’étoile hôte, elle émet davantage d’infrarouge que les autres planètes du système. Ces observations ont été réalisées avec l’imageur MIRIm, développé au CEA Paris-Saclay, en utilisant des filtres judicieusement choisis pour détecter la présence de dioxyde de carbone (CO2) et mesurer sa teneur.

La première campagne, menée en 2023 par une équipe de la NASA en collaboration avec le Département d’Astrophysique de l’IRFU au CEA Paris-Saclay, a utilisé un filtre centré sur λ=15 µm. Ces observations ont permis de déterminer que le côté jour de TRAPPIST-1 b présente une température d’environ 503 K (+/- 26 K), marquant ainsi la toute première mesure directe de la température d’une planète rocheuse tempérée dans l’histoire de l’étude des exoplanètes.

Avec une telle température, les scientifiques ont suggéré que TRAPPIST-1 b aurait plutôt une « surface nue et sombre », où la planète ne posséderait pas d’atmosphère, et sa surface absorberait presque toute la lumière stellaire incidente (Greene et al., 2023). Cette hypothèse repose sur le fait que le CO2 absorbe fortement à cette longueur d’onde ; une atmosphère riche en CO2 aurait donc considérablement réduit le flux observé. Cependant, une mesure unique à une longueur d’onde ne suffit pas pour exclure tous les scénarios atmosphériques possibles.

Surface nue ou atmosphère complexe ?

Figure 3 – Comparaison des différents scénarios de surface nue et atmosphériques pour la planète TRAPPIST-1 b, avec le cas de la Terre.
L’émission thermique mesurée à 12,8 (rouge foncé) et 15 microns (rouge clair) permet de discriminer ces scénarios. Le premier schéma (extrême gauche) illustre le scénario de « surface nue et sombre », suggéré lors de la première étude avec la mesure à 15 microns uniquement. Cette nouvelle étude remet en question ce scénario et propose deux nouvelles hypothèses : le scénario “surface nue ultramafique” et le scénario “atmosphère riche en brumes de CO2”.
Crédit : Ducrot et al. 2024

Cette nouvelle étude, menée par une équipe du CEA Paris-Saclay, complète les observations précédentes en mesurant cette fois-ci le flux de TRAPPIST-1 b à 12,8 microns, une seconde bande d’absorption caractéristique du CO2. Alors que le scénario initial de « surface sombre nue » proposé par Greene et al. (2023) prévoyait une température d’environ 227 °C à cette longueur d’onde, les chercheurs ont mesuré une température nettement plus basse, de 150 °C. Ce résultat invalide le scénario précédent, basé sur les observations à 15 microns, obligeant les chercheurs à explorer d’autres modèles de surface et d’atmosphère. Deux nouveaux scénarios semblent ressortir (cf. figure 3) :

  •     – Scénario « surface nue ultramafic » : TRAPPIST-1 b serait dépourvue d’atmosphère, mais sa surface serait composée de roches ultramafiques, des roches volcaniques riches en minéraux qui émettent moins de lumière à 12,8 microns qu’une surface sombre classique. Ce résultat suggère l’existence possible de volcanisme, car sans ce processus créant de nouvelles roches, les roches seraient rapidement altérées et noircies par l’activité de l’étoile.
  •    – Scénario « atmosphère riche en brumes de CO2 » : TRAPPIST-1 b possèderait une atmosphère riche en CO2 avec d’épaisses brumes, formées de minuscules particules ou gouttelettes issues de réactions chimiques liées à l’activité volcanique ou au rayonnement solaire. Ces brumes absorberaient la lumière stellaire et provoqueraient un réchauffement des couches supérieures de l’atmosphère, créant une inversion thermique où la température augmente avec l’altitude. Ce phénomène, similaire à celui de la stratosphère terrestre – bien que lié ici au CO2 et non à l’ozone – expliquerait une émission plus élevée à 15 microns par rapport à 12,8 microns, un comportement inattendu par rapport au CO2 observé sur Terre ou Vénus.
  •  

Bien que les brumes soient déjà connues pour influencer la température et l’apparence atmosphérique, comme sur Titan, leur impact sur TRAPPIST-1 b reste surprenant. Cependant, les auteurs estiment que le scénario « surface nue ultramafique » est plus probable, en raison de la complexité et des incertitudes associées à la formation de telles brumes.

« Nous avons été surpris de mesurer une température significativement plus basse qu’attendu. Nous pensions que le cas de TRAPPIST-1 b était clos, mais cette nouvelle longueur d’onde nous rappelle toutes les ambiguïtés qui existent pour décrire une planète à partir d’observations discrètes. » souligne Elsa Ducrot, chercheuse au Département d’Astrophysique du CEA et autrice principale de cette étude. « De plus, cette mesure a stimulé notre curiosité et nous a permis de proposer un scénario atmosphérique avec des brumes inédites en accord avec les données. Bien qu’il semble moins probable, il est très intéressant que la communauté scientifique puisse le prendre en compte dans l’interprétation des futures observations d’exoplanètes rocheuses. »

 

Comment lever le mystère ?

Figure 4 – Illustration de la courbe de phase : évolution du flux lumineux du système étoile-planète au cours d’une orbite complète.
La position (a) correspond au transit : La planète passe devant l’étoile. Le flux mesuré correspond à la lumière de l’étoile diminuée par l’absorption due au disque planétaire et à son éventuelle atmosphère. Cette configuration permet de sonder l’émission du côté nuit de la planète. La position (c) correspond à l’occultation (ou éclipse secondaire) : La planète est cachée derrière l’étoile. Le télescope ne capte alors que le flux lumineux de l’étoile, ce qui permet d’isoler et soustraire sa contribution. Enfin, la position (b) est juste avant et après l’occultation. L’intensité mesurée est maximale : le flux lumineux de la planète s’ajoute à celui de l’étoile.

Cette nouvelle étude souligne les défis posés par la détermination définitive de la présence d’une atmosphère sur une planète en se basant uniquement sur les mesures d’émission thermique lors des occultations. Pour lever définitivement le mystère de la présence d’une atmosphère sur TRAPPIST-1 b, les chercheurs ont alors initié une nouvelle campagne d’observation avec le JWST visant à mesurer le flux de la planète tout au long de son orbite complète, et non uniquement son côté jour (cf. figure 4). Complétée ensuite par des simulations atmosphériques 3D complexes, cette méthode, bien que coûteuse en temps d’observation, est essentielle pour trancher sur l’existence ou l’absence d’une atmosphère autour de TRAPPIST-1 b.

« Si une atmosphère est présente, la chaleur sera redistribuée du côté jour au côté nuit de la planète. Sans atmosphère, cette redistribution sera minimale », explique Michaël Gillon de l’Université de Liège, co-auteur de cette étude.

 

Ces réponses pourraient inaugurer une nouvelle ère dans l’étude des atmosphères des exoplanètes rocheuses.

En savoir plus :

Photobombes : lorsque des astéroïdes s’incrustent sur les images du JWST !

 

Alors que le JWST observait TRAPPIST-1, le système aux sept exoplanètes, une équipe internationale de chercheurs, incluant le Département d’Astrophysique du CEA Paris-Saclay, s’est aperçue que des passagers célestes faisaient régulièrement leur entrée dans le champ de vue. Ils ont alors mis au point une méthode pour les étudier et ont ainsi identifié 138 nouveaux astéroïdes de la ceinture principale. Ces corps célestes, allant de la taille d’un bus à celle de plusieurs stades, représentent les plus petits astéroïdes jamais détectés dans cette région de l’espace.
Grâce à cette nouvelle approche, les chercheurs peuvent désormais repérer des astéroïdes aussi petits que 10 mètres de diamètre, ouvrant la voie à une exploration approfondie des petits objets du système solaire. Cette avancée est cruciale pour mieux comprendre l’histoire du système solaire et pour améliorer le suivi des astéroïdes potentiellement dangereux, renforçant ainsi la sécurité planétaire.

 

Cette étude a été publiée dans la prestigieuse revue Nature, avec pour titre « JWST sighting of decameter main-belt asteroids and view on meteorite sources ».

 

L’observation des astéroïdes de la ceinture principale, une quête difficile

Figure 1 – Distribution en taille des astéroïdes de la ceinture principale, majoritairement peuplée par des astéroïdes de petite taille, tandis que les grands astéroïdes sont beaucoup plus rares, suivant une loi de puissance.
Crédits : Marco Colombo — DensityDesign Integrated Course Final Synthesis Studio

L’astéroïde à l’origine de l’extinction des dinosaures mesurait environ 10 kilomètres de diamètre, soit l’équivalent de la largeur de Brooklyn. Un tel impacteur ne frappe la Terre que très rarement, à une fréquence estimée entre une fois tous les 100 et 500 millions d’années. En revanche, des astéroïdes beaucoup plus petits, comparable à la taille d’un bus, peuvent toucher la Terre bien plus fréquemment, tous les quelques années, car ils sont beaucoup plus nombreux (cf. Figure 1). Ces astéroïdes, qualifiés de « décamétriques » en raison de leur diamètre d’une dizaine de mètres, sont néanmoins capables de générer des ondes de choc pouvant causer des dommages à l’échelle régionale, comme lors de l’explosion de 1908 à Tunguska, en Sibérie, ou celle de 2013 dans le ciel de Tcheliabinsk, dans l’Oural.

 

Ces astéroïdes proviennent majoritairement de la ceinture principale, située entre Mars et Jupiter, où des millions de corps célestes orbitent. Répertorier ces astéroïdes est fondamental, tant pour la recherche scientifique — afin d’élucider les origines et l’évolution du système solaire — que pour la sécurité planétaire — en identifiant les géocroiseurs, ces astéroïdes dont l’orbite croise celle de la Terre et qui pourraient représenter une menace.

 

Cependant, jusqu’à récemment, les instruments disponibles ne permettaient de détecter dans la ceinture principale que des astéroïdes mesurant au moins un kilomètre de diamètre. Cette limite est largement insuffisante, étant donné que la majorité des astéroïdes présents dans cette région sont beaucoup plus petits. De plus, ces petits astéroïdes ont une probabilité accrue de quitter la ceinture principale et de devenir des objets proches de la Terre, augmentant ainsi le risque de causer des dégâts significatifs sur notre planète. Une meilleure capacité à repérer ces corps de petite taille est donc cruciale pour répondre à ces enjeux.

De l'indésirable au désiré : quand des « parasites » deviennent une opportunité scientifique

Figure 1 – Découverte de nouveaux astéroïdes avec le JWST lors de l’observation du système TRAPPIST-1.
Crédits : Burdanov, de Wit et al., 2024, Nature.
a. Empilement de 500 images de l’étoile ultra-froide TRAPPIST-1.
Deux astéroïdes connus (2004 GH89 et 2016 UR72) se distinguent par une traînée blanche visible à gauche de l’image. Leur luminosité est telle qu’ils apparaissent sur les images individuelles. En revanche, quatre autres astéroïdes (#113, #109, #112 et #111), jusqu’alors inconnus, ne révèlent leur présence qu’après l’empilement des centaines d’images. Leurs trajectoires sont indiquées par des lignes pointillées.
b. Images des quatre nouveaux astéroïdes (#113, #109, #112 et #111) accompagnées de leurs propriétés respectives : vitesse (V, en arcsec/min), angle de position (PA, en degrés) et flux (F, en μJy).
Ces astéroïdes ont été découverts grâce à la technique du « décalage et empilement », qui consiste à recentrer les images successives sur la position des objets, puis à les superposer. Cette méthode améliore le rapport signal/bruit, révélant ainsi des objets invisibles sur une seule image.

Dans le cadre du programme intitulé “TRAPPIST-1 Planets: Atmospheres Or Not?”, co-dirigé par le Département d’Astrophysique (DAp) de l’IRFU du CEA Paris-Saclay, le télescope spatial James Webb (JWST) a observé le système exoplanétaire TRAPPIST-1 à l’aide de l’instrument MIRI. L’objectif était d’étudier la courbe de phase des deux premières planètes, TRAPPIST-1 b et c, afin de suivre l’évolution de leur flux lumineux sur une orbite complète. Ce type d’observation permet de mesurer l’émission thermique des différentes faces de chaque planète et d’étudier la répartition de la chaleur à leur surface, dans le but de confirmer ou d’infirmer la présence d’une atmosphère.

« Pour couvrir une période orbitale complète des planètes b et c (respectivement 1,5 jour et 2,42 jours), les observations se sont étendues sur environ 60 heures, constituant ainsi le programme d’observation continue d’une étoile le plus long réalisé par le JWST pour l’étude des exoplanètes », précise Elsa Ducrot, chercheuse au Département d’Astrophysique du CEA, co-leader de ce programme d’observation et co-autrice de cette étude.

Lors de l’analyse de ces observations, une équipe de recherche internationale, dirigée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT, USA) et incluant le DAp, s’est aperçue qu’elles étaient polluées par des astéroïdes traversant le champ de vue (cf. figure 2a). Bien que le champ soit très petit (56,3″ × 56,3″), de nombreux astéroïdes y apparaissent régulièrement, car TRAPPIST-1 est situé dans le plan de l’écliptique, où se trouvent les objets du système solaire, notamment ceux de la ceinture principale.

« Pour la plupart des astronomes, les astéroïdes sont considérés comme des nuisibles du ciel : ils traversent le champ de vision et perturbent les données », remarque Julien de Wit, co-auteur principal de cette étude et chercheur au MIT.

Une nouvelle fenêtre sur l’espace

Figure 3 – Illustration d’artiste représentant une myriade de petits astéroïdes de la ceinture principale révélés par le JWST.
Credits: Ella Maru, Ella Maru Studio

La présence de TRAPPIST-1 dans le champ de l’instrument MIRI est une véritable opportunité, car sa sensibilité dans l’infrarouge moyen en fait un outil parfaitement adapté à l’observation des astéroïdes. En lumière visible, on ne perçoit que la lumière solaire réfléchie par l’astéroïde. Si celui-ci est petit et éloigné, le flux lumineux est alors extrêmement faible. En revanche, en infrarouge, on capte la lumière émise directement par l’astéroïde, ce qui augmente considérablement le flux observable. Grâce à son grand pouvoir collecteur et à sa vision infrarouge, le JWST se révèle donc être un instrument idéal pour détecter les petits corps de notre système solaire.

 

En traitant plus de 10 000 images du système TRAPPIST-1 prises par le JWST, l’équipe a identifié huit astéroïdes déjà répertoriés dans la ceinture principale. En approfondissant le traitement des données, ils ont réussi à détecter 138 nouveaux astéroïdes, tous d’un diamètre de quelques dizaines de mètres (cf. Figure 2 b). Ces objets constituent les plus petits astéroïdes jamais observés dans cette région à ce jour, permettant d’explorer une nouvelle population d’astéroïdes (cf. Figure 3).

« C’est une toute nouvelle région de l’espace que nous explorons, grâce aux technologies modernes », ajoute Artem Burdanov, auteur principal de l’étude et chercheur au MIT. « C’est un bon exemple de ce que nous pouvons accomplir en analysant les données différemment. Parfois, les résultats dépassent nos attentes, et c’est le cas ici. »

Les chercheurs prévoient d’exploiter cette méthode pour identifier et suivre de nouveaux géocroiseurs, dont l’orbite croise celle de la Terre.

« Nous avons déjà pu détecter des objets proches de la Terre mesurant jusqu’à 10 mètres lorsqu’ils étaient très près de nous », explique Artem Burdanov. « Nous avons maintenant une façon de repérer ces petits astéroïdes beaucoup plus loin, ce qui nous permet d’effectuer un suivi orbital plus précis, essentiel pour la défense planétaire. »
image
JWST