Photobombes : lorsque des astéroïdes s’incrustent sur les images du JWST !

 

Alors que le JWST observait TRAPPIST-1, le système aux sept exoplanètes, une équipe internationale de chercheurs, incluant le Département d’Astrophysique du CEA Paris-Saclay, s’est aperçue que des passagers célestes faisaient régulièrement leur entrée dans le champ de vue. Ils ont alors mis au point une méthode pour les étudier et ont ainsi identifié 138 nouveaux astéroïdes de la ceinture principale. Ces corps célestes, allant de la taille d’un bus à celle de plusieurs stades, représentent les plus petits astéroïdes jamais détectés dans cette région de l’espace.
Grâce à cette nouvelle approche, les chercheurs peuvent désormais repérer des astéroïdes aussi petits que 10 mètres de diamètre, ouvrant la voie à une exploration approfondie des petits objets du système solaire. Cette avancée est cruciale pour mieux comprendre l’histoire du système solaire et pour améliorer le suivi des astéroïdes potentiellement dangereux, renforçant ainsi la sécurité planétaire.

 

Cette étude a été publiée dans la prestigieuse revue Nature, avec pour titre « JWST sighting of decameter main-belt asteroids and view on meteorite sources ».

 

L’observation des astéroïdes de la ceinture principale, une quête difficile

Figure 1 – Distribution en taille des astéroïdes de la ceinture principale, majoritairement peuplée par des astéroïdes de petite taille, tandis que les grands astéroïdes sont beaucoup plus rares, suivant une loi de puissance.
Crédits : Marco Colombo — DensityDesign Integrated Course Final Synthesis Studio

L’astéroïde à l’origine de l’extinction des dinosaures mesurait environ 10 kilomètres de diamètre, soit l’équivalent de la largeur de Brooklyn. Un tel impacteur ne frappe la Terre que très rarement, à une fréquence estimée entre une fois tous les 100 et 500 millions d’années. En revanche, des astéroïdes beaucoup plus petits, comparable à la taille d’un bus, peuvent toucher la Terre bien plus fréquemment, tous les quelques années, car ils sont beaucoup plus nombreux (cf. Figure 1). Ces astéroïdes, qualifiés de « décamétriques » en raison de leur diamètre d’une dizaine de mètres, sont néanmoins capables de générer des ondes de choc pouvant causer des dommages à l’échelle régionale, comme lors de l’explosion de 1908 à Tunguska, en Sibérie, ou celle de 2013 dans le ciel de Tcheliabinsk, dans l’Oural.

 

Ces astéroïdes proviennent majoritairement de la ceinture principale, située entre Mars et Jupiter, où des millions de corps célestes orbitent. Répertorier ces astéroïdes est fondamental, tant pour la recherche scientifique — afin d’élucider les origines et l’évolution du système solaire — que pour la sécurité planétaire — en identifiant les géocroiseurs, ces astéroïdes dont l’orbite croise celle de la Terre et qui pourraient représenter une menace.

 

Cependant, jusqu’à récemment, les instruments disponibles ne permettaient de détecter dans la ceinture principale que des astéroïdes mesurant au moins un kilomètre de diamètre. Cette limite est largement insuffisante, étant donné que la majorité des astéroïdes présents dans cette région sont beaucoup plus petits. De plus, ces petits astéroïdes ont une probabilité accrue de quitter la ceinture principale et de devenir des objets proches de la Terre, augmentant ainsi le risque de causer des dégâts significatifs sur notre planète. Une meilleure capacité à repérer ces corps de petite taille est donc cruciale pour répondre à ces enjeux.

De l'indésirable au désiré : quand des « parasites » deviennent une opportunité scientifique

Figure 1 – Découverte de nouveaux astéroïdes avec le JWST lors de l’observation du système TRAPPIST-1.
Crédits : Burdanov, de Wit et al., 2024, Nature.
a. Empilement de 500 images de l’étoile ultra-froide TRAPPIST-1.
Deux astéroïdes connus (2004 GH89 et 2016 UR72) se distinguent par une traînée blanche visible à gauche de l’image. Leur luminosité est telle qu’ils apparaissent sur les images individuelles. En revanche, quatre autres astéroïdes (#113, #109, #112 et #111), jusqu’alors inconnus, ne révèlent leur présence qu’après l’empilement des centaines d’images. Leurs trajectoires sont indiquées par des lignes pointillées.
b. Images des quatre nouveaux astéroïdes (#113, #109, #112 et #111) accompagnées de leurs propriétés respectives : vitesse (V, en arcsec/min), angle de position (PA, en degrés) et flux (F, en μJy).
Ces astéroïdes ont été découverts grâce à la technique du « décalage et empilement », qui consiste à recentrer les images successives sur la position des objets, puis à les superposer. Cette méthode améliore le rapport signal/bruit, révélant ainsi des objets invisibles sur une seule image.

Dans le cadre du programme intitulé “TRAPPIST-1 Planets: Atmospheres Or Not?”, co-dirigé par le Département d’Astrophysique (DAp) de l’IRFU du CEA Paris-Saclay, le télescope spatial James Webb (JWST) a observé le système exoplanétaire TRAPPIST-1 à l’aide de l’instrument MIRI. L’objectif était d’étudier la courbe de phase des deux premières planètes, TRAPPIST-1 b et c, afin de suivre l’évolution de leur flux lumineux sur une orbite complète. Ce type d’observation permet de mesurer l’émission thermique des différentes faces de chaque planète et d’étudier la répartition de la chaleur à leur surface, dans le but de confirmer ou d’infirmer la présence d’une atmosphère.

« Pour couvrir une période orbitale complète des planètes b et c (respectivement 1,5 jour et 2,42 jours), les observations se sont étendues sur environ 60 heures, constituant ainsi le programme d’observation continue d’une étoile le plus long réalisé par le JWST pour l’étude des exoplanètes », précise Elsa Ducrot, chercheuse au Département d’Astrophysique du CEA, co-leader de ce programme d’observation et co-autrice de cette étude.

Lors de l’analyse de ces observations, une équipe de recherche internationale, dirigée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT, USA) et incluant le DAp, s’est aperçue qu’elles étaient polluées par des astéroïdes traversant le champ de vue (cf. figure 2a). Bien que le champ soit très petit (56,3″ × 56,3″), de nombreux astéroïdes y apparaissent régulièrement, car TRAPPIST-1 est situé dans le plan de l’écliptique, où se trouvent les objets du système solaire, notamment ceux de la ceinture principale.

« Pour la plupart des astronomes, les astéroïdes sont considérés comme des nuisibles du ciel : ils traversent le champ de vision et perturbent les données », remarque Julien de Wit, co-auteur principal de cette étude et chercheur au MIT.

Une nouvelle fenêtre sur l’espace

Figure 3 – Illustration d’artiste représentant une myriade de petits astéroïdes de la ceinture principale révélés par le JWST.
Credits: Ella Maru, Ella Maru Studio

La présence de TRAPPIST-1 dans le champ de l’instrument MIRI est une véritable opportunité, car sa sensibilité dans l’infrarouge moyen en fait un outil parfaitement adapté à l’observation des astéroïdes. En lumière visible, on ne perçoit que la lumière solaire réfléchie par l’astéroïde. Si celui-ci est petit et éloigné, le flux lumineux est alors extrêmement faible. En revanche, en infrarouge, on capte la lumière émise directement par l’astéroïde, ce qui augmente considérablement le flux observable. Grâce à son grand pouvoir collecteur et à sa vision infrarouge, le JWST se révèle donc être un instrument idéal pour détecter les petits corps de notre système solaire.

 

En traitant plus de 10 000 images du système TRAPPIST-1 prises par le JWST, l’équipe a identifié huit astéroïdes déjà répertoriés dans la ceinture principale. En approfondissant le traitement des données, ils ont réussi à détecter 138 nouveaux astéroïdes, tous d’un diamètre de quelques dizaines de mètres (cf. Figure 2 b). Ces objets constituent les plus petits astéroïdes jamais observés dans cette région à ce jour, permettant d’explorer une nouvelle population d’astéroïdes (cf. Figure 3).

« C’est une toute nouvelle région de l’espace que nous explorons, grâce aux technologies modernes », ajoute Artem Burdanov, auteur principal de l’étude et chercheur au MIT. « C’est un bon exemple de ce que nous pouvons accomplir en analysant les données différemment. Parfois, les résultats dépassent nos attentes, et c’est le cas ici. »

Les chercheurs prévoient d’exploiter cette méthode pour identifier et suivre de nouveaux géocroiseurs, dont l’orbite croise celle de la Terre.

« Nous avons déjà pu détecter des objets proches de la Terre mesurant jusqu’à 10 mètres lorsqu’ils étaient très près de nous », explique Artem Burdanov. « Nous avons maintenant une façon de repérer ces petits astéroïdes beaucoup plus loin, ce qui nous permet d’effectuer un suivi orbital plus précis, essentiel pour la défense planétaire. »

Des astronomes observent la formation in situ de sphéroïdes dans des galaxies lointaines brillantes en submillimétrique

 

 

S’appuyant sur des avancées techniques et observationnelles, une équipe internationale dirigée par des chercheurs du Département d’Astrophysique de l’IRFU (CEA Paris-Saclay) a élucidé le mystère de la formation des sphéroïdes, que l’on trouve dans les bulbes des galaxies à spirales et dans les galaxies elliptiques géantes. Ces structures, longtemps considérés principalement comme le produit de fusions galactiques tardives dans l’histoire cosmique, pourraient se former aussi directement dans l’Univers lointain. Leur forme sphérique résulterait d’une intense formation d’étoiles induite par un processus dynamique combinant l’accrétion de gaz froid et des interactions galactiques.
Ces découvertes représentent une avancée majeure dans notre compréhension de l’évolution des galaxies, impactant les modèles actuels qui bénéficieront aussi d’observations à haute résolution grâce aux télescopes de dernière génération (JWST, Euclid, etc.).

Cette recherche a été présentée dans un article intitulé « 
In situ spheroid formation in distant submillimetre-bright Galaxies », publié dans la prestigieuse revue Nature.

 

Des limites techniques et observationnelles enfin levées

Figure 1 – Exemples d’images capturées avec le JWST, issues de l’échantillon de galaxies analysé dans cette étude.
Les images en couleur ont été reconstruites en combinant trois filtres : F444W (rouge), F227W (vert) et F150W (bleu). La région délimitée par des pointillés cyan correspond au meilleur ajustement des profils de brillance de surface de l’émission submillimétrique. La barre blanche en bas des vignettes indique l’échelle, tandis que le nom de la source et le décalage vers le rouge (z) des galaxies sont mentionnés en haut de chaque vignette.
Crédit : Tan et al. 2024

Les galaxies de l’Univers se divisent en deux grandes catégories morphologiques. D’un côté, les galaxies spirales, en forme de disques, comme notre Voie Lactée. Elles sont jeunes, riches en gaz et continuent de former des étoiles. De l’autre, les galaxies sphéroïdales, qui incluent les galaxies elliptiques et les bulbes des galaxies spirales. Elles sont dépourvues de gaz, composées d’étoiles très âgées et ne forment quasiment plus d’étoiles ; elles sont comme « mortes ». Si la formation des galaxies spirales est peut-être mieux comprise, celle des galaxies sphéroïdales restait un mystère jusqu’à présent, malgré l’existence de plusieurs théories, qui demeuraient limitées par nos moyens observationnelles et techniques d’avant.

Pour comprendre la formation de ces sphéroïdes, il faut remonter à la naissance des étoiles qui les composent, jusqu’à l’ère du « Midi cosmique », lorsque l’Univers était âgé de 1,6 à 4,3 milliards d’années. À cette époque, de nombreuses galaxies formaient activement des étoiles et étaient riches en poussière et en gaz, les rendant opaques dans le spectre visible, mais extrêmement lumineuses dans les longueurs d’onde millimétriques et submillimétriques. L’arrivée de l’Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (ALMA), capable d’observer dans ce domaine du spectre, a donc ouvert la possibilité d’étudier les bulbes galactiques. Ces observations sont complétées par la vision infrarouge du puissant Télescope Spatial James Webb (JWST) qui apporte une vue globale des galaxies (cf. Figure 1).

Cette recherche a également été rendue possible grâce à une avancée technique importante. Dans une publication précédente (Tan et al. 2024, A&A), les chercheurs ont développé une nouvelle méthode pour ajuster des profils de luminosité de surface à des observations interférométriques, comme celles produites par ALMA. Avant cette innovation, l’extraction d’informations à partir de ces données était complexe, et les méthodes existantes introduisaient trop de biais, rendant difficile une analyse approfondie des systèmes sphéroïdaux.

Nouvelles perspectives sur la formation des galaxies elliptiques géantes dans l’Univers primitif

Figure 2 – Schéma illustrant le processus de formation des sphéroïdes dans les galaxies lointaines brillantes en submillimétrique et son lien avec l’évolution des galaxies elliptiques géantes dans l’Univers actuel.
À l’extrême gauche, les images infrarouges capturées par le JWST (voir légende Fig. 1) sont suivies d’un zoom sur leurs régions centrales en submillimétrique, obtenu grâce à ALMA. Le schéma propose également une classification des formes intrinsèques des galaxies. Les paramètres moyens des morphologies sont représentés pour : l’ensemble de l’échantillon étudié (ellipse verte), un sous-échantillon de galaxies compactes en submillimétrique (ellipse orange) et un sous-échantillon de galaxies étendues en submillimétrique (ellipse bleue). Ces paramètres sont comparés à ceux des galaxies locales de type précoce (ellipse rouge) et de type tardif (représentées par des formes spirales violettes et cyan).
Crédit : Tan et al. 2024

Cette étude s’appuie sur des observations ALMA collectées au fil des années par divers projets. Grâce aux projets archivistiques A3COSMOS et A3GOODS, les chercheurs ont pu constituer un échantillon de plus d’une centaine de galaxies à formation stellaire intense, très brillantes dans le domaine submillimétrique, avec un rapport signal/bruit élevé (S/B > 50). Ces galaxies proviennent de l’Univers primitif, alors âgé de seulement 1,6 à 4,3 milliards d’années (redshift entre z = 1,5 et 4). Une telle richesse de données aurait été impossible à obtenir dans le cadre d’une demande classique de temps d’observation, soulignant l’importance de l’exploitation des archives pour des études de cette envergure.

La première découverte concerne la morphologie des composantes submillimétriques au centres de ces galaxies, qui correspondent aux lieux de formation d’étoiles. L’étude indique que la plupart de centres de ces galaxies sont intrinsèquement sphériques, et non en forme de disque comme on le pensait. En effet, les chercheurs ont constaté que l’émission submillimétrique de ces galaxies est très compacte, avec des profils de brillance de surface s’écartant significativement de ceux typiques des disques. Cette conclusion est renforcée par des modélisations détaillées de leur géométrie 3D, qui montrent que le rapport entre les axes les plus courts et les plus longs est en moyenne de moitié, augmentant avec la compacité spatiale (cf. Figure 2).

La deuxième révélation de cette étude concerne le mécanisme de formation des galaxies sphéroïdales. On a longtemps pensé que les sphéroïdes se formaient tardivement dans l’histoire de l’Univers, principalement par coalescence, c’est-à-dire par la fusion de deux galaxies après collision. Cependant, cette étude apporte une perspective nouvelle : on a observé des sphéroïdes se former directement à partir de flambées d’étoiles, probablement dû à l’action simultanée de l’accrétion de gaz froid et des interactions entre galaxies, sans nécessiter de fusion. Ces processus conduisent à une intense formation d’étoiles concentrée dans les cœurs tridimensionnels de ces galaxies, et ce, dès les premières époques de l’histoire cosmique.

Un possible accès aux lieux de naissance des grandes galaxies elliptiques

Figure 3 – Le JWST a récemment permis de dévoiler la véritable nature de la galaxie voisine M104, connue sous le nom de galaxie du Sombrero.
Grâce à sa vision infrarouge, le télescope a pu observer à travers la poussière et le gaz, qui donnaient l’illusion de bras spiraux. Les nouvelles données confirment que le Sombrero est en réalité une galaxie elliptique entourée d’un anneau, avec une formation stellaire très faible (moins d’une masse solaire par an).
Crédit : © (NASA, ESA, CSA, STScI)

Cette étude a fourni les premières preuves observationnelles solides que les sphéroïdes peuvent se former directement grâce à une intense formation d’étoiles, alimentée par l’accrétion de gaz froid et des interactions galactiques simultanées dans les cœurs des galaxies. Ce processus, apparemment très répandu dans l’Univers lointain, constitue un tournant dans notre compréhension de la formation et de l’évolution des bulbes des galaxies a spirales, et peut être aussi des galaxies elliptiques géantes, telles que M87 dans la constellation de la Vierge, dont les sites de naissance étaient recherchés depuis des décennies.

De nouvelles observations ALMA, bénéficiant d’une résolution et d’une sensibilité accrues, combinées aux données d’archives, permettront d’explorer en détail la distribution et la cinématique du gaz froid — la matière première de la formation stellaire — au sein de ces galaxies par le biais d’études statistiques. Par ailleurs, les capacités des télescopes JWST, Euclid et du télescope spatial de la Station Spatiale Chinoise (CSST) pour cartographier les composantes stellaires des galaxies viendront compléter cette approche, offrant une vision plus complète de leur évolution (cf. Figure 3). Ensemble, ces outils promettent de révolutionner notre compréhension de la formation des galaxies dans l’Univers primitif.

En savoir plus :

Trois monstres galactiques dans l’Univers primitif

 

 

Le modèle standard de la cosmologie, fondement de notre compréhension de l’Univers depuis le Big Bang, est-il en danger ? Les récentes observations du télescope spatial James Webb (JWST), menées par une équipe internationale dont fait partie le Département d’Astrophysique du CEA-IRFU, révèlent des galaxies massives dans l’Univers jeune qui ont suscité un vif débat au sein de la communauté scientifique. Alors que certains chercheurs y voient une remise en question de ce modèle, d’autres avancent que ces masses galactiques ont été surestimées, suggérant que des mesures plus précises pourraient résoudre l’énigme sans invalider le modèle standard. Grâce au programme FRESCO, des données spectroscopiques plus précises que les précédentes mesures semblent réconcilier ces galaxies précoces avec les prévisions théoriques. Toutefois, trois cas extrêmes continuent de défier notre compréhension de la formation galactique.

 

Cette découverte a été publiée dans la prestigieuse revue Nature.

 

Le modèle standard de la cosmologie remis en question

Figure 1 : Images des trois galaxies massives et lointaines qui défient notre compréhension de la formation galactique.
Crédits : NASA/CSA/ESA, M. Xiao & P. A. Oesch (Université de Genève), G. Brammer (Niels Bohr Institute), Dawn JWST Archive.

 

Le modèle standard de la cosmologie, également appelé modèle ΛCDM (Lambda Cold Dark Matter), est actuellement le modèle de référence pour décrire l’évolution de l’Univers depuis le Big Bang. Il permet notamment d’expliquer des observations astronomiques telles que le fond diffus cosmologique — un rayonnement provenant de toutes les directions du ciel —, les structures à grande échelle, ainsi que la formation des galaxies en amas.

Ainsi, lorsque les astronomes ont jeté un premier coup d’œil sur la jeunesse de l’Univers grâce au télescope spatial James Webb (JWST) de la NASA, ils s’attendaient à observer des galaxies modestes et en pleine croissance, conformément aux prédictions de ce modèle standard. Or, les scientifiques ont découvert une abondance inattendue de galaxies bien trop massives pour le jeune âge de l’Univers.

Depuis lors, deux communautés scientifiques s’opposent : d’un côté, ceux qui estiment que ces découvertes révèlent des lacunes dans le modèle standard de la cosmologie, nécessitant sa remise en question complète ; de l’autre, ceux qui contestent les mesures de masses galactiques, jugées surestimées car fondées uniquement sur des observations photométriques insuffisamment précises. Selon ces derniers, il faudrait plutôt ajuster les modèles de croissance galactique sans pour autant remettre en cause le modèle standard.

Le programme d’observations FRESCO apporte de nouveaux éléments de réponses

Figure 2 : Images et spectres des trois galaxies ultra-massives et primitives (Z ∼ 5 – 6) observées par le programme d’observation FRESCO utilisant l’instrument NIRCam du JWST.
Les images à gauche ont été prises avec trois filtres NIRCam (1,82 µm, 2,10 µm et 4,44 µm), puis combinées en couleur (F182M en bleu, F210M en vert et F444W en rouge), accompagnées de la carte en Hα. À droite, les spectres 1D (couvrant les lignes d’émission Hα, [NII] et [SII]) ont été obtenus avec le grisme NIRCam et le filtre F444W. Les zones grises montrent l’incertitude associée à 1 sigma, et la ligne bleue représente le modèle qui ajuste au mieux les données.
Crédits : Xiao et al. 2024.

 

C’est dans ce contexte qu’une équipe internationale, incluant des astronomes du Département d’Astrophysique du CEA Paris-Saclay, apporte de nouvelles explications grâce au programme d’observation FRESCO. L’objectif de ce programme est de mesurer avec précision la masse des premières galaxies à l’aide de l’instrument NIRCam/grism du JWST, qui permet des mesures spectroscopiques à haute résolution, bien plus précises que les précédentes mesures photométriques (voir Figure 2).

« NIRCam nous permet d’identifier et d’étudier la croissance des galaxies au fil du temps, et d’obtenir une image plus précise de l’accumulation de la masse stellaire au cours de l’histoire cosmique », explique Pascal Oesch, professeur assistant au Département d’astronomie de l’UNIGE, principal investigateur de ce programme d’observation et co-auteur de cette nouvelle étude.
« Seul le télescope James Webb a la capacité de mesurer la masse stellaire des galaxies à des époques aussi reculées, jusqu’à un milliard d’années après le Big Bang, car la lumière y est décalée vers l’infrarouge », explique David Elbaz, directeur scientifique du Département d’Astrophysique au CEA Paris-Saclay et co-auteur de l’article.

Le programme d’observation FRESCO apporte de nouveaux éléments de réponses

Figure 3 : Comparaison des masses de galaxies massives et lointaines en fonction de leur décalage vers le rouge (Z), mesurées par photométrie et spectroscopie, par rapport aux attentes théoriques du modèle standard de la cosmologie (ΛCDM).
Les cercles gris représentent les galaxies rapportées dans la littérature, avec celles dont le décalage vers le rouge (Z) a été mesuré uniquement par photométrie (carrés vides gris). Les cercles rouges vides correspondent aux 36 galaxies observées dans le cadre du programme FRESCO, dont les décalages vers le rouge ont été mesurés précisément par spectroscopie grâce au JWST. Les barres d’erreur montrent les incertitudes des mesures. Les lignes rouges et bleues indiquent la masse maximale des galaxies attendue selon le modèle ΛCDM, en fonction de l’efficacité de conversion des baryons en étoiles (Epsilon = 1 et 0,2, respectivement), tandis que la ligne noire représente la limite supérieure du modèle. Les cercles rouges pleins correspondent aux trois galaxies qui défient nos théories de formation galactique. Bien qu’elles restent compatibles avec le modèle ΛCDM, ces galaxies ultra-massives présentent une efficacité de formation stellaire moyenne de Epsilon ∼ 0,5, ce qui suggère une conversion très efficace des baryons en étoiles, difficilement explicable avec les modèles actuels.
Crédits : Xiao et al. 2024

 

En utilisant les données du programme FRESCO, l’équipe de chercheurs a ainsi pu mener une étude systématique de 36 galaxies massives. L’analyse suggère que la majorité des galaxies ultra-massives dans la jeunesse de l’Univers sont compatibles avec le modèle cosmologique standard, à l’exception de trois d’entre elles, qui représentent un défi potentiel et remettent en question les modèles de formation galactique (voir Figure 3).

« Ces galaxies présentent des taux de formation d’étoiles proches de 1 000 masses solaires par an, des niveaux qui ne peuvent s’expliquer que par un processus de formation extrêmement efficace, que les modèles actuels ne parviennent pas à reproduire », affirme Dr. Mengyuan Xiao, post-doctorante au Département d’astronomie de l’UNIGE et première autrice de l’étude.

La remise en cause du modèle standard cosmologique semble donc s’éloigner. En effet, les nouvelles observations plus précises des masses galactiques permettent de réconcilier les observations avec les prédictions du modèle standard. Cependant, l’existence de ces trois galaxies ultra-massives si tôt dans l’histoire de l’Univers défie notre compréhension de la formation des galaxies dans l’Univers jeune.

« Ces résultats suggèrent que parmi les premières galaxies, certaines étaient capables de convertir le gaz en étoiles avec une efficacité extrême, bien au-delà de ce que prédisent les modèles actuels. Les futures observations avec le JWST et l’Atacama Large Millimeter Array (ALMA) seront essentielles pour déterminer si ces galaxies ultra-massives représentent un cas isolé ou un phénomène plus répandu », enchérit la chercheuse.

« Il va maintenant falloir comprendre comment l’univers a formé des galaxies plus massives que la Voie lactée il y a près de 13 milliards d’années, soit environ un milliard d’années après le big bang », conclut David Elbaz

 

JWST détecte de nouvelles molécules à la surface de Charon, le plus gros satellite de Pluton

 

Une étude à laquelle le CNRS Terre & Univers a participé vient de révéler la présence de nouvelles molécules à la surface de Charon, le plus gros satellite de Pluton, grâce aux observations du télescope spatial James Webb (JWST). Alors qu’une mission de la NASA, New Horizons, avait déjà permis de cartographier cette lune en 2015, les récentes observations de JWST ont permis de détecter pour la première fois du dioxyde de carbone et du peroxyde dhydrogène à sa surface, enrichissant ainsi notre compréhension de sa composition chimique.


Cette découverte a été publiée dans la prestigieuse revue Nature.

 

Spectre de la lumière réfléchie par la surface de Charon, obtenu par la mission New Horizons (en rose) et JWST (blanc), mettant en évidence les signatures du CO2 et du H2O2. Arrière-plan: vue de Charon observée par New Horizons. 
Crédits : S.Protopapa/SwRI/NASA/ESA/CSA/STScI/JHUAPL
Contrairement à d’autres objets de la ceinture de Kuiper comme les planètes naines, la surface de Charon n’est pas recouverte de glaces volatiles comme le méthane, ce qui rend sa composition globale plus accessible aux analyses. Les découvertes permises par JWST ouvrent la voie à l’étude approfondie des processus qui façonnent les surfaces de ces objets glacés. Ainsi, la présence de peroxyde d’hydrogène montre que la surface de Charon, riche en glace d’eau, subit des modifications causées par la lumière ultraviolette du Soleil, et les particules énergétiques du vent solaire et des rayons cosmiques. Pour le dioxyde de carbone, l’interprétation privilégiée est que le CO2 de la couche supérieure provient de l’intérieur et a été exposé à la surface par des cratères. On sait que le dioxyde de carbone est présent dans les régions du disque protoplanétaire à partir desquelles le système plutonien s’est formé.
 

Ces informations fournissent un aperçu précieux sur l’évolution chimique et physique des objets glacés dans les régions les plus éloignées du système solaire.

 

En savoir plus :

Le JWST découvre les étoiles de la branche géante asymptotique dans des galaxies lointaines quiescentes

 

 

La compréhension des diverses populations stellaires constituant les galaxies est cruciale pour étudier la formation de ces dernières à travers le temps cosmique. Néanmoins, des irréductibles étoiles résistent encore et toujours aux modélisateurs ! Leur nature complexe et leur courte durée de vie rendent les étoiles de la branche asymptotique des géantes thermiquement pulsantes (TP-AGB) difficiles à modéliser, un sujet de débat depuis des décennies. Le télescope spatial James Webb permet enfin de lever le voile sur leur contribution au spectre des galaxies lointaines. Ces découvertes ont des répercussions sur la détermination de l’âge et de la masse stellaire des galaxies, ainsi que sur la production de poussière cosmique et l’enrichissement chimique.

Cette découverte vient d’être publiée dans la prestigieuse revue Nature.

 

Les étoiles TP-AGB – le chainon manquant pour l’étude des galaxies

Figure 1 – Comparaison des modèles de spectres de différentes populations stellaires. La connaissance de ces modèles est essentielle car ils permettent de déduire des informations clés telles que l’âge et la masse d’une galaxie.

Crédit : Lu et al. 2024

Pour comprendre la formation et l’évolution des galaxies, les chercheurs utilisent les populations stellaires qui les composent en comparant les spectres des galaxies observées à des modèles stellaires basés sur des observations et théories.


Bien que la plupart des phases d’évolution des étoiles sont bien modélisées, les étoiles TP-AGB, des géantes asymptotiques à pulsation thermique, restent une source d’incertitude. En effet, avec une durée de vie courte (entre 0,6 et 2 milliards d’années) et une évolution rapide du fait de phénomènes complexes comme la perte de masse et les pulsations thermiques, ces étoiles sont particulièrement difficiles à modéliser.


La contribution des étoiles froides TP-AGB à l’émission infrarouge des galaxies fait ainsi l’objet d’une controverse depuis longtemps. Si leur contribution est significative, cela pourrait diminuer les estimations d’âge et de masse des galaxies, en particulier pour celles âgées d’environ 1 milliard d’années, fréquemment observées dans l’univers lointain. Une telle révision aurait des répercussions majeures sur notre compréhension de la formation et de l’évolution des galaxies (voir Figure 1).


Premières signatures claires d'étoiles TP-AGB révélées par le télescope spatial James Webb

Figure 2 – Le spectre révèle de nombreuses absorptions larges ainsi que des discontinuités spectrales, signatures caractéristiques des étoiles TP-AGB. Il s’agit de la première détection de ces étoiles dans le spectre d’une galaxie lointaine. 

Crédit : Lu et al. 2024

Les étoiles TP-AGB sont des astres froids qui présentent des signatures spectrales distinctives dans le proche infrarouge (0,5-2 microns), notamment des bandes d’absorption larges et des discontinuités causées par diverses molécules. Dans le cas où ces étoiles contribueraient de manière significative à la lumière d’une galaxie, ces caractéristiques spectrales devraient être facilement détectables.

 

Une équipe de chercheurs dirigée par le Département d’Astrophysique du CEA-Saclay a utilisé des observations du télescope spatial James Webb (JWST) dont la sensibilité dans l’infrarouge est idéale pour détecter ces étoiles dans les galaxies quiescentes jeunes (∼ 1 milliard d’années) et lointaines (z = 1–2). Les chercheurs ont sélectionné trois galaxies issues du programme CEERS (JWST NIRSpec Cosmic Evolution Early Release Science), dont l’une, beaucoup plus lumineuse que les autres, offrait un spectre de haute qualité.

 

Le spectre de cette galaxie, nommée D36123, a révélé des signatures claires d’étoiles TP-AGB riches en oxygène et en carbone, avec une contribution importante à la lumière de la galaxie (voir Figure 2). Les deux autres galaxies, bien que présentant un spectre de qualité inférieure, confirment ces observations.

Les modèles de synthèse stellaire intégrant une contribution significative des étoiles TP-AGB s’ajustent mieux aux spectres observés, indiquant que ces galaxies pourraient être moins massives et plus jeunes que prévu initialement. Ces résultats ont également des implications pour la production de poussière cosmique et l’enrichissement chimique des galaxies.

 

De futures observations pour contraindre les modèles

Figure 3 : Planification des nouvelles observations de galaxies quiescentes avec le JWST. Les carrés bleus indiquent les champs d’observation prévus avec l’instrument NIRSpec du JWST, tandis que les points rouges représentent les galaxies quiescentes brillantes, telles que D36123.
Crédit : Lu et al. 2024

La galaxie D36123 est unique et n’a pas d’analogue connu dans l’Univers proche, offrant un premier aperçu de l’émission des étoiles froides dans les galaxies lointaines. Cette découverte met fin au débat sur leur présence dans les galaxies âgées de plusieurs milliards d’année. Toutefois, même le modèle qui correspond le mieux aux données ne parvient pas à expliquer toute la richesse des signatures spectrales détectées. Un échantillon plus vaste d’observations similaires est donc crucial pour déterminer si les caractéristiques de la galaxie D36123 sont exceptionnelles ou si elles reflètent des propriétés communes des galaxies quiescentes.

L’équipe de chercheurs a d’ailleurs obtenu de nouvelles observations avec le JWST pour approfondir ces questions. A plus long terme, l’équipe envisage d’observer ces galaxies à plus grande longueur d’onde afin d’obtenir de meilleurs modèles stellaires, guidés par les observations actuelles et futures.

Découverte et étendue de glaces de CO₂ et CO dans la région transneptunienne

 

Un grand programme d’observation du télescope spatiale James Webb a récemment fourni la première vue d’ensemble des Objets Trans-Neptuniens (OTNs), les petits corps primitifs de notre système solaire externe, orbitant au-delà de Neptune, d’où sont issus une partie des comètes. Les observations de 59 objets obtenues avec l’instrument NIRSpec ont été analysées par une équipe de recherche internationale impliquant l’Institut d’Astrophysique Spatiale et le Laboratoire de Géologie de Lyon. Les spectres infrarouges révèlent les toutes premières détections de glaces de CO₂ et de CO sur des petits corps du système solaire externe.

 

L'intérêt de l'étude des objets transneptuniens

Impression d’artiste d’un objet de la ceinture de Kuiper (KBO), appelé aussi objets transneptuniens (OTN). Il s’agit de petits corps primitifs de notre Système solaire externe, orbitant au-delà de la planète Neptune.
Crédits : NASA, ESA, and G. Bacon (STScI)

Les OTNs étant formés assez loin du Soleil, ils regorgent encore d’informations concernant leur formation il y a plus de 4 milliards d’années, à l’inverse des planètes naines comme Pluton qui pourraient avoir subi une évolution interne majeure. Les OTNs ont également été témoins de processus de migration planétaire qui les ont, pour la majorité, redistribués loin de leur région de formation. 

 

Caractériser leur composition permettrait de reconstruire une image du jeune système solaire externe avant cette réorganisation drastique. Mais, jusqu’à présent, les observations des OTNs étaient limitées, livrant une caractérisation très partielle de leur composition chimique : seules les glaces d’eau et de méthanol avaient été détectées sur une poignée d’objets.

 

Un cocktail de molécules inattendu !

Spectre infrarouge de la surface d’un objet trans-neptunien avec mise en avant des bandes d’absorption fondamentales de CO₂ et CO.
Crédits : William Gonzalez Sierra, Florida Space Institute.

Contre toute attente, le CO₂ est très répandu, présent sur 95% des objets dans des proportions pourtant variables. Remarquablement, du ¹³CO₂ est également détecté ce qui ouvre la possibilité d’étudier le rapport isotopique du carbone à travers le système solaire externe. Alors que le CO n’est pas stable dans la région transneptunienne, il est pourtant détecté conjointement au CO₂ sur 47% des objets. 

 

Cette diversité de composition, traduite par les variations d’abondance mais également d’état physico-chimique de la glace, va permettre de retracer l’histoire des OTNs pour retrouver leur lieu de formation dans le disque protoplanétaire, en différenciant son influence de celle de processus d’évolution plus tardifs. En effet, si le CO₂ a pu être hérité du disque protoplanétaire, le CO serait plus probablement formé par le vent solaire et les rayons cosmiques qui bombardent continuellement ces surfaces glacées sans atmosphère.

 

 

La NASA récompense l’équipe de la mise en service du JWST

 

La NASA a récemment décerné le Silver Group Achievement Award à 232 experts mondiaux pour leur contribution à la mise en service du télescope spatial James Webb (JWST). Ces experts ont travaillé 24 heures sur 24 pendant les six mois du commissioning. Leur travail acharné a permis d’obtenir pour tous les instruments des performances finales surpassant les spécifications initiales. Parmi cette équipe, on compte six Français.

 

Un travail d'équipe

Figure 2 – Christophe Cossou et Daniel Dicken dans le Centre de Contrôle des Opérations de la Mission JWST au Space Telescope Science Institute (STScI) au moment de la première observation avec l’instrument MIRI (first light), visible sur l’écran en arrière-plan.

Le télescope spatial James Webb (JWST) est le premier observatoire d’astrophysique au monde et un succès incontestable. Les équipes dédiées, qui ont confirmé le fonctionnement des instruments scientifiques (IS) et des sous-systèmes pendant les six mois de mise en service, sont la clé de ce succès. Grâce à des séquences méticuleusement planifiées et à une coordination soignée entre toutes les activités de l’observatoire, ces équipes internationales ont assuré une couverture 24h/24, examiné les données et résolu les problèmes dès qu’ils se présentaient.

Parmi eux, six Français : Pierre-Olivier Lagage (CEA Paris-Saclay), co-responsable de l’instrument MIRI, Christophe Cossou (CEA Paris-Saclay), Daniel Dicken (CEA Paris-Saclay et Institut d’Astrophysique Spatiale), Alain Coulais (CEA Paris-Saclay et Observatoire de Paris), Pierre Baudoz (Observatoire de Paris) et Pierre Guillard (Institut d’Astrophysique de Paris)

 

 

La mise en service de MIRI

Figure 3 – Equipe responsable de la mise en service de l’instrument MIRI au STSCI (Baltimore – USA) qui abrite le Centre d’Opération du JWST.

L’une des caractéristiques du JWST est d’observer dans la portion de l’infrarouge moyen du spectre électromagnétique via l’instrument MIRI (instrument Mid InfraRed) à forte contribution française. Les observations sont possibles grâce à un refroidissement actif fourni par un cryoréfrigérateur qui « extrait » la chaleur des plans focaux et des optiques de MIRI pour offrir des performances spectroscopiques sans précédent. Il a fallu attendre trois mois après le lancement du télescope pour que le cryoréfrigérateur atteigne la température requise de 7 K, soit près de -266°C.

 

« J’étais aux commandes quand on a démarré le cryoréfrigérateur et tout s’est magnifiquement passé. Voir en direct la température descendre… Là on se dit que ça va aller ! » Témoigne Alain Coulais, ingénieur de Recherche détaché au Département d’Astrophysique du CEA-Saclay

Grâce à une planification précise des tests et de l’analyse des données de la part des équipes (cf. Figure 3), l’instrument MIRI a été entièrement mis en service en seulement trois semaines. MIRI n’a rencontré qu’un seul problème : une caractéristique inattendue de lumière parasite a fait échouer la méthode prévue pour aligner les coronographes. Une fois ce problème résolu, les coronographes ont été alignés et ont dépassé leurs performances initialement prévues d’un facteur de quatre.

 

« Etre aux commandes pour activer l’ouverture de l’instrument vers le ciel, puis l’acquisition de la première image fut un moment magique, l’aboutissement de plusieurs années de préparation » Explique Christophe Cossou, ingénieur de Recherche au Département d’Astrophysique du CEA-Saclay

La mise en service de NIRCam

Figure 4 – Image de l’étoile 2MASS J17554042+6551277 prise par le télescope spatial James Webb après l’alignement de son miroir primaire. Les figures de diffraction autour de l’étoile confirme l’alignement parfait des 18 segments constituant le miroir primaire. 

Crédit : NASA/STScI

L’équipe responsable de la caméra proche infrarouge (NIRCam) a permis l’alignement optique des 18 segments du miroir primaire du JWST (cf. Figure 4). Ils ont traité les problèmes de stabilité de pointage, des états thermiques inattendus et de l’exécution des activités qui ont permis d’obtenir un télescope aligné qui dépasse les spécifications pour lesquels il a été construit.

 

La mise en service de NIRSpec

Figure 5. A Gauche : Schéma de l’agencement de l’assemblage des micro-obturateurs (MSA), avec des cibles scientifiques (en bleu) montrées dans leurs volets MSA ouverts (en vert). Crédit : NASA/STScI
A droite : Exemple d’utilisation des MSA pour mesurer la distance obtenue avec NIRSpec des galaxies individuelles parmi un champ de milliers de galaxies. Crédit : NASA, ESA, CSA, STScI

Au sein de l’équipe du spectrographe proche infrarouge (NIRSpec), chaque observation a été soigneusement planifiée pour garantir une efficacité maximale, et toutes les activités de calibration ont été complétées dans les délais impartis.

NIRSpec utilise des réseaux de 250 000 micro-obturateurs (MSA), de petites fenêtres qui peuvent être sélectionnées individuellement pour observer des étoiles cibles (cf. Figure 5). Pour résoudre les problèmes d’acquisition de cibles MSA, l’équipe a passé des jours et des nuits à trouver des problèmes sur les systèmes connexes et à les résoudre.

 

La mise en service de FGS

Figure 6 – Cette image test du détecteur du FGS a été acquise sur une période de huit jours lors de la phase de la mise en service et des tests de performance du JWST. Bien que non optimisée pour la détection d’objets faibles, elle capture néanmoins des objets extrêmement faibles. 

Crédit: NASA, CSA, and FGS team.

Le capteur de guidage fin (FGS) fournit des images d’étoiles cataloguées au système de contrôle d’attitude 16 fois par seconde, permettant à Webb de pointer avec précision en restant très stable sur une longue durée (cf. Figure 6). Grâce aux efforts de l’équipe FGS, la précision de pointage dépasse là aussi les spécifications initialement prévues.

Le guidage nécessite une surveillance quasi constante depuis la console. L’équipe a effectué de nombreuses répétitions spécifiques au FGS pour se préparer au processus complexe d’alignement des miroirs. Leurs efforts ont conduit à plusieurs réalisations majeures qui ont amélioré les capacités de guidage. Ils ont analysé des images pour générer des paramètres mis à jour, améliorant ainsi les performances de guidage pour les étoiles brillantes et les champs encombrés, et ont également perfectionné les scripts de commande pour optimiser les performances globales.

 

La mise en service de NIRISS

Figure 7 – Courbe de lumière obtenu avec l’instrument NIRISS d’un transit de l’exoplanète géante WASP-96 b devant son étoile. NIRISS est parfaitement adapté à ce type d’observation à fort contraste. Lors de cette observation, l’instrument a pu mesurer des différences de luminosité de l’ordre de 0,02 %. 

Crédit : NASA, ESA, CSA, STScI

Un problème résolu par l’équipe de l’imageur infrarouge proche et du spectrographe sans fente (NIRISS) était la lumière dispersée provenant de l’assemblage de l’échangeur de chaleur MIRI (HSA). Ils ont identifié le problème et confirmé qu’une fois le HSA refroidi, les niveaux de signal sont tombés aux limites attendues (cf. Figure 7).

Après une défaillance initiale de l’acquisition de cible, l’équipe a travaillé pour corriger les scripts embarqués, ce qui a abouti à une acquisition de cible qui dépasse les attentes.

 

Le ICDH et l’ISIM

Figure 8 – Falaises cosmiques dans la nébuleuse de la Carène prise par la caméra NIRCam, l’une des nombreuses images spectaculaires du JWST qui sont possibles grâce à l’effort d’une équipe internationale que le prix d’argent de la NASA récompense. 

Crédit : NASA, ESA, CSA, STScI

Le module de commande et de traitement des données des instruments scientifiques intégrés (ICDH) et l’unité des services distants ISIM (IRSU) ne reçoivent pas les acclamations des instruments scientifiques, mais sans eux, il n’y aurait pas de logiciel pour prendre les images, pas de commande, et pas de données transmises au sol.

Cette équipe a soutenu les tests et les répétitions avant et après le lancement, travaillant 24 heures sur 24 pendant les six mois complets de mise en service. Non seulement leurs sous-systèmes ont fonctionné sans heurts, mais leur expertise a été une ressource précieuse pour les autres équipes en cas de problème.

Les résultats de la dévotion de l’équipe de mise en service conjointe sont graphiquement illustrés par les images inspirantes publiées au public (cf. Figure 8).

 

Le James Webb découvre toujours plus d’hydrocarbures dans les disques autour d’étoiles de très faible masse

 

Une équipe de recherche internationale impliquant des scientifiques de l’Université Paris-Saclay, du CEA, du CNRS, de l’Ecole Polytechnique et de l’Observatoire de Paris vient de révéler la composition chimique d’un disque de matière en rotation autour d’une jeune étoile où se forment de nouvelles planètes. Les résultats révèlent le plus grand nombre de molécules carbonées jamais observées dans un tel disque, dont certaines détectées pour la première fois en dehors de notre système solaire. Ces découvertes ont des implications sur la composition potentielle des planètes en formation autour de cette étoile. Ces résultats, publiés dans la revue Science le jeudi 6 juin, ont été obtenus dans le cadre du programme temps garanti de l’instrument MIRI, développé par un consortium de laboratoires en Europe et aux Etats-Unis.

 

L’étude des disques protoplanétaires

Figure 1 : Impression d’artiste d’une jeune étoile entourée d’un disque de gaz et de poussière.
Crédits : NASA/JPL-Caltech

Les planètes rocheuses sont très communes autour des étoiles de très faible masse (moins de 0,3 masse solaire), comme en témoigne le fameux système planétaire TRAPPIST-1. On sait pourtant peu de choses sur la chimie de ces mondes, qui peuvent être semblables ou très différents de la Terre. En étudiant les disques à partir desquels ces planètes se forment, appelés disques protoplanétaires, les astronomes espèrent mieux comprendre le processus de formation des planètes et la composition des planètes qui en résultent.

 

Les disques protoplanétaires autour d’étoiles de très faible masse sont difficiles à étudier parce qu’ils sont plus petits et moins lumineux que les disques autour d’étoiles plus massives. Le programme appelé MIRI Mid-INfrared Disk Survey (MINDS) vise à utiliser les capacités uniques du télescope spatial James Webb (JWST) pour faire le lien entre les propriétés des disques et les propriétés des exoplanètes.

 

Un cocktail de molécules détectées autour de la jeune étoile ISO-ChaI-147

Figure 2 : Ce graphique représente le spectre du disque protoplanétaire autour de l’étoile ISO-ChaI-147 révélé par l’instrument MIRI (Mid-Infrared Instrument) du télescope spatial James Webb. Le spectre montre la chimie des hydrocarbures la plus riche observée à ce jour dans un disque protoplanétaire, avec 13 molécules carbonées, dont la première détection extrasolaire d’éthane (C2H6) et la première détection d’éthylène (C2H4), de propyne (C3H4) et de radical méthyle (CH3) dans un disque.
Crédits : NASA, ESA, CSA, Ralf Crawford (STScI)

Dans une nouvelle étude, cette équipe a exploré la région autour d’une étoile de très faible masse connue sous le nom d’ISO-ChaI-147, une étoile âgée de 1 à 2 millions d’années, dont la masse n’est que de 0,11 fois celle du Soleil.
 
Le spectre révélé par l’instrument MIRI du JWST montre la chimie d’hydrocarbure la plus riche observée à ce jour dans un disque protoplanétaire – un total de 13 molécules carbonées différentes (cf. Figure 2). L’équipe a notamment détecté pour la première fois de l’éthane (C2H6) en dehors de notre système solaire, ainsi que de l’éthylène (C2H4), du propyne (C3H4) et le radical méthyle CH3.

 

« Il est incroyable que nous puissions détecter et quantifier la quantité de molécules que nous connaissons bien sur Terre, comme le benzène, dans un objet situé à plus de 600 années-lumière », explique Agnès Perrin, chercheuse CNRS au Laboratoire de Météorologie Dynamique (LMD – CNRS/ENS-PSL/IPP/Sorbonne Université).

« L’an dernier, nous avions déjà découvert une très grande quantité d’acétylène (C2H2), de diacétylène (C4H2) et du benzène (C6H6) dans un disque autour d’une étoile similaire. Ici c’est un cocktail encore plus riche de molécules qui est découvert, confirmant que les disques autour de ce type d’étoile sont de vraies usines d’hydrocarbures », ajoute Benoît Tabone, chercheur CNRS à l’Institut d’Astrophysique Spatiale (IAS – Université Paris-Saclay/CNRS).

Une vision plus précise des disques autour des étoiles de très faible masse

Vidéo 1 : Illustration le spectre du disque protoplanétaire de l’étoile ISO-ChaI-147, capturé par l’instrument MIRI du télescope JWST, montrant le mouvement typique des molécules responsable de l’absorption dans le spectre.

Ces résultats ont des implications importantes pour la chimie du disque interne et des planètes qui pourraient s’y former. Comme le JWST a révélé que le gaz présent dans le disque est riche en carbone, il est probable qu’il reste peu de carbone dans les matériaux solides à partir desquels les planètes se formeraient. Par conséquent, les planètes rocheuses qui pourraient s’y former seraient finalement pauvres en carbone.
 

Ces travaux soulignent la nécessité cruciale pour les scientifiques de collaborer entre les différentes disciplines. L’équipe note que ces résultats et les données qui les accompagnent peuvent contribuer à d’autres domaines, notamment la physique théorique, la chimie et l’astrochimie, afin d’interpréter les spectres et d’étudier de nouvelles signature spectroscopique de molécules dans cette gamme de longueurs d’onde.

Des chercheurs cartographient la météo sur une planète située à 280 années-lumière grâce au James Webb

Une équipe internationale de chercheurs, dont fait partie le CEA-Saclay et le LESIA, a utilisé le télescope spatial James Webb de la NASA pour cartographier la météo de la géante gazeuse chaude WASP-43 b.

Des mesures en infrarouge moyen obtenues avec l’instrument MIRI, combinées à des modèles climatiques 3D et à d’autres observations suggèrent la présence de nuages épais et denses du côté nuit, un ciel dégagé du côté jour, et des vents équatoriaux atteignant jusqu’à 8 000 km/h, mixant les gaz atmosphériques autour de la planète.

Cette étude démontre les avancées de la science des exoplanètes grâce aux capacités uniques du JWST à mesurer les variations de température et à détecter les gaz atmosphériques à des centaines d’année-lumière de nous.

Cette étude fait l’objet d’une publication dans la prestigieuse revue Nature Astronomy.

Jupiter chaud lié par effet de marée

Figure 1 – Vue d’artiste de l’exoplanète géante gazeuse WASP-43 b située à environ 280 années-lumière dans la constellation du Sextan. 

Crédits : NASA, ESA, CSA, Ralf Crawford (STScI)

WASP-43 b est une exoplanète de type “Jupiter chaud” (Figure 1). De taille similaire à Jupiter et principalement composée d’hydrogène et d’hélium, elle est beaucoup plus chaude que les géantes gazeuses de notre propre système solaire, en raison de sa proximité avec son étoile, à moins de 1/25e de la distance entre Mercure et le Soleil.
Avec une orbite aussi serrée, la planète est gravitationnellement bloquée par effet de marée, présentant ainsi toujours la même face à son étoile. Elle a donc un côté continuellement illuminé et l’autre dans l’obscurité permanente. Toutefois, même si le côté nuit ne reçoit jamais de radiation directe de l’étoile, des vents atmosphériques orientés vers l’est transportent la chaleur du côté jour.
Depuis sa découverte en 2011, WASP-43 b a été observée avec de nombreux télescopes, dont les télescopes spatiaux Hubble de la NASA et Spitzer qui n’est plus en service.

“Avec Hubble, nous pouvions clairement voir qu’il y a de la vapeur d’eau du côté jour. Tant Hubble que Spitzer ont suggéré qu’il pourrait y avoir des nuages du côté nuit,” explique Taylor Bell, chercheur à la BAER Institute et auteur principal de cette étude. “Mais nous avions besoin de mesures plus précises du JWST pour commencer vraiment à cartographier la température, la couverture nuageuse, les vents et la composition atmosphérique plus détaillée tout autour de la planète.”

Cartographier la température et déduire la météo

Figure 2 – Courbe de phase du système WASP-43, obtenue par le spectromètre MIRI à basse résolution (LRS) du télescope spatial James Webb pendant 24h. La courbe de phase montre le changement de luminosité du système WASP-43 au fil du temps, lorsque la planète tourne autour de son étoile. Le système apparaît le plus lumineux lorsque le côté chaud de la planète fait face au télescope, juste avant et après son passage derrière l’étoile. Le système s’assombrit au fur et à mesure que la planète poursuit son orbite et que le côté nuit est visible par rotation. Il s’éclaircit à nouveau après être passé devant l’étoile, lorsque le côté jour revient dans le champ de vision. 
Crédits : Image : NASA, ESA, CSA, Ralf Crawford (STScI) ; Science : Taylor J. Bell (BAERI), Joanna Barstow (Open University), Michael Roman (University of Leicester).
La courte période orbitale de WASP-43 b, seulement 19,5 heures, en fait un candidat idéal pour la spectroscopie en courbe de phase, qui consiste à mesurer la variation de luminosité du système étoile-planète pendant que la planète orbite autour de l’étoile. Cette technique permet de cartographier la température à la surface de toute la planète.
 
En effet, la température d’un astre est étroitement liée à la quantité de lumière qu’il émet. Pour mesurer la lumière émise par la planète, on calcule la différence entre la luminosité de l’étoile seule (lorsque la planète est cachée derrière elle) et la luminosité combinée de l’étoile et de la planète (lorsque la planète est visible).
 
L’instrument MIRI, optimisé pour l’infrarouge moyen (de 5 à 12 microns), du JWST est un outil parfait pour cette technique car, d’une part, une planète émet principalement dans cette gamme spectrale du fait de sa température intrinsèque, et d’autre part, il faut que l’instrument soit suffisamment sensible pour détecter des différences de luminosité de l’ordre de quelques parties par million, soit 40 parties par million (0,004 %) dans le cas de WASP-43 !
 

L’équipe a donc pointé MIRI vers WASP-43 afin de mesurer la lumière du système toutes les 10 secondes pendant plus de 24 heures, soit un peu plus que le temps nécessaire à WASP-43 b pour faire le tour de son étoile. La Figure 2 montre le résultat des quelques 8 000 mesures prises dans l’infrarouge moyen.

Figure 3 – Ce graphique présente la variation de la température à la surface de l’exoplanète géante gazeuse WASP-43 b. Le côté jour possède une température moyenne d’environ 1250°C, tandis que celle du côté nuit est d’environ 600°C. Cette différence de température s’explique par le fait que la planète présente toujours la même face à son étoile, mais également par d’autres facteurs comme la vitesse du vent et la présence de nuages. Des modèles atmosphériques 3D complexes révèlent que le point le plus chaud de la planète n’est pas directement sous l’étoile, mais décalé d’environ 7 degrés vers l’est en raison de forts vents équatoriaux déplaçant l’air chaud à l’horizontale avant qu’il ne puisse rayonner de l’énergie vers l’espace. Ces vents transportent la chaleur vers le côté nuit, bien que ce dernier apparaisse tout de même trop froid, probablement en raison de nuages qui retiennent l’énergie thermique.

Crédit : Image : NASA, ESA, CSA, Ralf Crawford (STScI) ; Science : Taylor J. Bell (BAERI); Joanna Barstow (Open University); Michael Roman (University of Leicester)

“En observant sur toute une orbite, nous avons pu calculer la température des différents côtés de la planète lorsqu’ils entrent en vue,” explique Bell. “À partir de là, nous avons pu construire une carte approximative de la température à travers la planète.”

Les mesures montrent que le côté jour a une température moyenne de près de 1 250°C tandis que le côté nuit est significativement plus froid avec 600°C (cf. Figure 3). Les données aident également à localiser le point le plus chaud de la planète (le “point chaud”), qui est légèrement décalé vers l’est par rapport au point qui reçoit le plus de radiation stellaire (le « point substellaire »), là où l’étoile est la plus haute dans le ciel de la planète. Ce décalage se produit en raison des vents supersoniques, qui déplacent l’air chauffé vers l’est.

“Le fait que nous puissions cartographier la température de cette manière est un véritable témoignage de la sensibilité et de la stabilité de Webb,” déclare Michael Roman, co-auteur de l’Université de Leicester au Royaume-Uni.

Pour interpréter la carte, l’équipe a utilisé des modèles atmosphériques 3D complexes similaires à ceux utilisés pour comprendre la météo et le climat sur Terre. L’analyse montre que le côté nuit est probablement recouvert d’une épaisse couche nuageuse à haute altitude qui empêche une partie de la lumière infrarouge de s’échapper dans l’espace. En conséquence, le côté nuit – bien que très chaud – semble plus sombre et plus froid qu’il ne le serait s’il n’y avait pas de nuages.

Méthane manquant et vents forts

Figure 4 – Ce graphique compare les molécules attendues et observées dans l’atmosphère de l’exoplanète WASP-43 b, de jour comme de nuit. Comme attendu, la vapeur d’eau est présente des deux côtés, contraignant l’épaisseur des nuages et leur altitude dans l’atmosphère. Cependant, l’absence de méthane dans l’atmosphère, surtout du côté nuit, étonne car étant plus frais, il devrait exister. Les chercheurs expliquent cette absence par des vents extrêmement rapides, atteignant au moins 8000 km/h, qui empêchent la formation de méthane du côté nuit à des seuils détectables par le JWST. 
Crédits : NASA, ESA, CSA, Ralf Crawford (STScI), Joanna Barstow (Open University).

Le large spectre de lumière en infrarouge moyen (de 5 à 12 microns) capturé par le James Webb a également permis de mesurer la quantité de certaines molécules dans l’atmosphère de la planète WASP-43 b.

“Webb nous a donné l’opportunité de déterminer exactement quelles molécules nous observons et de mettre des limites sur les abondances,” déclare Joanna Barstow, co-auteur de l’Open University au Royaume-Uni.

Les spectres montrent des signes clairs de vapeur d’eau tant du côté nuit que du côté jour de la planète, fournissant des informations supplémentaires sur l’épaisseur des nuages et leur altitude dans l’atmosphère.

 

Cependant, les données montrent l’absence de méthane dans l’atmosphère. Du côté jour, cela n’est pas étonnant car il y fait trop chaud pour que la molécule puisse exister (la majeure partie du carbone devrait être sous forme de monoxyde de carbone). Toutefois, elle devrait être stable et détectable du côté nuit car plus frais.

“Le fait que nous ne voyions pas de méthane nous indique que WASP-43 b doit avoir des vitesses de vent atteignant environ 8000 km/h” explique Barstow. “Si les vents déplacent assez rapidement le gaz du côté jour vers le côté nuit et vice versa, il n’y a pas assez de temps pour que les réactions chimiques attendues produisent des quantités détectables de méthane du côté nuit.”

L’équipe pense qu’en raison de ce mélange induit par le vent, la chimie atmosphérique est la même tout autour de la planète, ce qui n’était pas évident d’après les travaux précédents avec Hubble et Spitzer.

La Supernova iconique SN 1987A sous le projecteur du JWST

Les supernovae sont des corps célestes fondamentaux dans l’évolution de l’univers, mais elles revêtent toujours d’importants mystères comme, par exemple, leur contribution relative à la production de poussières dans l’univers primordial. 

La supernova SN 1987A est apparue le 23 février 1987 dans le Grand Nuage de Magellan, à quelques 165000 années-lumière de nous. C’est la première supernova visible en 400 ans, depuis celle de 1604, dite de Kepler, en l’honneur de Johannes Kepler, qui en fut un de ses observateurs les plus assidus, et qui s’est produite, elle, dans notre Galaxie (plus précisément dans la constellation d’Ophiuchus). Née à l’ère des télescopes, SN 1987A a été depuis sa naissance, et est toujours, observée par les moyens les plus modernes dont disposent les astronomes. Elle est devenue à ce titre une véritable icone, sans être vraiment emblématique de sa classe. Rien d’étonnant, donc, à ce qu’elle soit une des premières cibles du Télescope Spatial James Webb, le JWST, dont il n’est plus nécessaire de souligner l’extrême sensitivité et l’excellente résolution angulaire.

Figure 1 – Image de SN 1987A et de son environnement, obtenue en 2022 avec le Télescope Spatial Hubble (HST) à travers un filtre centré sur la longueur d’onde de l’hydrogène à 1.08 micron. Les contours indiquent la région d’où provient l’émission d’argon fortement ionisé observée avec le MRS et NIRSpec, qui marque la présence d’un objet compact (voir le dernier paragraphe de cet article). L’étoile indique le centre de l’anneau équatorial (Fransson et al., 2024).

 

Le domaine spectral qui correspond à l’infrarouge est très important: il complète les autres domaines de longueurs d’onde du spectre électromagnétique d’un corps céleste, ce qui est nécessaire pour comprendre les mécanismes physiques qui sont en jeu; de plus, il permet non seulement d’étudier les poussières mais aussi de voir des sources lumineuses qui peuvent être cachées par ces poussières.  

Si plusieurs observations de supernovae ont été réalisées dans l’infrarouge proche (entre 1 et 5 micron), SN 1987A est la seule supernova à avoir été observée dans l’infrarouge moyen (entre 5 et 30 micron) pour être la seule connue qui soit suffisamment brillante à ces longueurs d’onde. Ces observations ont démarré depuis son apparition, mais c’était alors depuis le sol, avec tous les inconvénients que produit l’atmosphère à ces longueurs d’onde. Tous les instruments du JWST ont magnifiquement pallié ces inconvénients pour donner aux astronomes une nouvelle vision des mécanismes physiques en cours, du cœur de la supernova à son environnement circumstellaire, et jusqu’au milieu interstellaire.


Une description de l’environnement de SN 1987A ainsi qu’un compte rendu des premières observations effectuées avec le JWST se trouvent ici. Ces observations se sont poursuivies, et des résultats spectaculaires ont été obtenus. Ils sont décrits dans ce qui suit.

SN 1987A vue en Infrarouge Moyen

Avec l'imageur MIRIm

Carte des températures calculées avec un modèle standard de la composition des poussières, sur laquelle sont superposés les contours de l’image obtenue à 5,6 micron (le niveau des contours en mJy/pixel est indiqué sur la figure) (Bouchet et al., 2024).

MIRI, conçu et construit en grande partie par le CEA, sous l’égide du CNES, est l’instrument du JWST qui observe dans l’infrarouge moyen. Sa composante imageur a permis d’élaborer une carte détaillée des températures en jeu, tout en fournissant des données inédites sur la morphologie de ce que les astronomes appellent « les Restes de la Supernova » (Supernova Remnant).  Une attention particulière a été portée sur les poussières : certaines résultent de l’évolution de l’étoile progénitrice (elles sont donc antérieures à l’évènement) et se trouvent en particulier dans les différents anneaux, tandis que d’autres se sont condensées dans les éjecta pendant l’évènement. A l’aide de l’imageur de MIRI, une destruction des poussières dans certaines zones, et une nouvelle condensation de celles-ci dans d’autres ont pu être observées. Les images obtenues montrent que l’onde de choc initiale, véritable moteur du phénomène, a maintenant atteint les régions extérieures du milieu circumstellaire (voir l’article de Bouchet et al.).

Images obtenue à 5,6, 10, 18 et 25,5 micron avec l’imageur de MIRI (MIRIm), avec les contours de l’image obtenue avec le MRS à 6,985 micron, qui correspond à la longueur d’onde de l’argon doublement ionisé. Les dimensions du faisceau lumineux pour chaque longueur d’onde sont illustrées en bas à gauche de chaque image (Bouchet et al., 2024).

Avec le spectroscope MIRI MRS

Toujours dans l’infrarouge moyen (ou thermique), le spectrographe à moyenne résolution spectrale de MIRI (appelé MRS, pour Medium Resolution Spectrograph) a permis grâce à son excellent pouvoir de séparation spatial de distinguer en détails les éjecta de la supernova, l’anneau équatorial qui les entoure, et le milieu circumstellaire plus lointain. L’anneau équatorial est situé à une distance de 0,7 année-lumière du centre de la supernova, et résulte d’un épisode de l’évolution de son progéniteur il y a quelques 20000 ans. Le milieu circumstellaire plus lointain consiste en particulier en deux anneaux qui formerait un sablier s’il était vu perpendiculairement à son grand axe (voir figure dans l’actualité précitée). Lorsque du gaz en expansion heurte des régions denses, il se refroidit. Les spectres de la lumière émise dans ces différentes régions permettent de mettre en évidence certaines propriétés de ce gaz lorsqu’il rentre en contact avec l’anneau équatorial, et après le choc. Ils ont aussi conduit à l’identification d’éléments chimiques dans les milieux les moins denses, dont la forte ionisation pourrait avoir été produite par la progression d’une succession d’onde de chocs à travers l’anneau, ou par le rayonnement UV associé à l’origine de l’évènement. Le MRS a aussi montré que les grains de poussières les plus petits sont plus facilement détruits que ceux de dimensions supérieures, et a mis en lumière les principaux éléments qui composent les éjecta (voir l’article de Jones et al.)

SN 1987A vue en Infrarouge Proche

Avec l'imageur NIRCam

L’extraordinaire résolution angulaire de la caméra NIRCam (Near Infrared Camera) , avec un pouvoir de séparation de 0,05 seconde d’arc dans l’infrarouge proche a permis d’identifier pour la première fois trois régions bien distinctes : (1) de faibles croissants d’hydrogène moléculaire, situés entre les éjecta et l’anneau équatorial, (2) une barre qui est une substructure des éjecta, et (3) une émission continue brillante à l’extérieur de l’anneau. Dans les courtes longueurs d’onde (de 1 à 2,3 micron), les images de NIRCam montrent que le rayonnement provient d’une émission de raies qui révèlent la présence des éléments chimiques qui se trouvent dans les éjecta et dans certaines régions de l’anneau équatorial (que les astronomes appellent les points chauds). Par contre, dans la fenêtre spectrale comprise entre 3 et 5 micron, il s’agit d’une émission continue provenant de poussières dans les éjecta (poussières qui, par ailleurs, pourraient masquer le centre de la supernova), et d’une émission synchrotron dans l’anneau équatorial et son extérieur. Ces observations montrent que le refroidissement et la destruction des poussières sont plus rapides que le refroidissement du rayonnement synchrotron, qui est lui-même plus rapide que la recombinaison de l’hydrogène dans l’anneau. Un sous-produit très important de ces observations réalisées avec NIRCam, est que celles-ci ouvrent une nouvelle fenêtre dans l’étude de l’accélération des particules et de la physique des chocs dans des détails sans précédent, lorsqu’ils sont explorés par l’émission synchrotron dans le proche infrarouge. Ceci permet d’établir une image très précise de la façon dont une supernova évolue (voir l’article de Matsuura et al.).

Image composée à partir de cinq filtres de NIRCam (1,5 et 1.6 micron en bleu ; 2 micron en jaune ; 4 micron en orange; 4,4 micron en rouge). L’intérieur des éjecta est composé essentiellement de fer qui rayonne à 1.6 micron. A l’intérieur des éjecta, on aperçoit une barre alignée approximativement sur la direction Est – Ouest, et 2 croissants apparaissent entre les éjecta et l’anneau équatorial. Des points chauds sont aussi visibles dans l’anneau équatorial délimité par les 2 ellipses, mais on en trouve aussi à l’extérieur de cet anneau. La position des 2 anneaux extérieurs est indiquée par les ellipses en pointillés (Nord vers le haut, Est vers la droite). (Matsuura et al., 2024)

Avec le spectroscope NIRSpec

Pour clore cette série d’observations, le spectrographe NIRSpec (Near Infrared Spectrograph) a fourni la première spectroscopie spatialement résolue de l’éjecta et de l’anneau équatorial entre 1 et 5 micron. Pour la première fois aussi, des cartes en 3-D des émissions du fer à l’intérieur des éjecta ont pu être construites, ainsi que de celles de l’hélium dans le choc inverse (tout choc qui se propage dans une région dense génère un choc inverse) : la première sonde la géométrie de l’évènement et la seconde trace la composition du milieu circumstellaire. La carte 3-D du fer, prépondérant dans les éjecta, révèle une morphologie fortement asymétrique qui ressemble à un dipôle brisé dominé par deux gros amas animés de vitesses élevées (environ 2300 km/s). Ces observations prouvent également que l’intérieur de ces éjecta a commencé à interagir avec le choc inverse. NIRSpec a observé aussi de très nombreuses raies d’hydrogène moléculaire : celui-ci est très probablement excité par un rayonnement ultraviolet extrême, mais pourrait aussi résulter d’une combinaison de collisions et recombinaisons dans les couches des éjecta de basse température. Enfin, plusieurs raies coronales très fortement ionisées ont été identifiées dans l’anneau équatorial : leur existence requiert une température supérieure à 2 millions de degrés qui serait associée au rayonnement observé dans les hautes énergies, en particulier dans les rayons-X (voir l’article de Larsson et al.)

Image obtenue avec NIRSpec dans la région spectrale autour de 1,44 micron : c’est la longueur d’onde du fer que l’on voit dans les ejecta, alors que le fer et l’hydrogène qui sont présents dans l’anneau équatorial rayonnent à 1,427 et 1,460 respectivement. La courbe indiquée en pointillés délimite approximativement la région où le choc inverse est détecté (un seul composant du continuum est présent à cette longueur d’onde). L’anneau équatorial est incliné de 43°, et le Nord est dirigé vers l’observateur (Larsson et al., 2024).

Visualisation 3D de l’hélium présent dans le choc inverse. La position des anneaux extérieurs est indiquée par les ellipses bleu et rouge. L’anneau équatorial est connecté aux anneaux extérieurs par les lignes en pointillés pour aider à la visualisation (Larsson et al., 2024).

Un mystère finalement élucidé

Finalement, pour couronner magistralement cette moisson de résultats, le JWST a permis d’élucider un mystère de longue date. Les neutrinos sont des particules élémentaires, de masse pratiquement nulle, qui sont engendrées par des réactions nucléaires. Tandis que le Soleil produit des neutrinos de basse énergie, les neutrinos de haute énergie sont produits par des cataclysmes cosmiques extrêmement violents tels que les supernovae. L’implosion d’une supernova génère en effet une émission de neutrinos, puisque lors de l’effondrement gravitationnel du cœur de l’étoile, les électrons fusionnent avec les protons, produisant des neutrons et des neutrinos. Ces neutrinos sont hautement énergétiques (99% de l’énergie émise par les supernovae l’est sous forme de neutrinos) : une telle émission a été observée quelques heures avant l’apparition de l’évènement lumineux visible par les observatoires de Kamiokande II, IMB et Baksan (Kamiokande détecta 11 neutrinos, IMB 8 neutrinos et Baksan 5 neutrinos), le temps d’un éclair qui dura moins de 13 secondes.

 

Les observations de neutrinos constituent une preuve irréfutable que l’évènement a donné naissance à une étoile à neutron (ou à un trou noir), mais où est-elle?

Les neutrinos n’interagissant que très faiblement avec la matière, ils sont immédiatement libérés, c’est pourquoi le pic de neutrinos a été détecté 3 heures avant la contrepartie optique. Une étoile à neutrons peut présenter différents aspects : si elle tourne rapidement sur elle-même et qu’elle possède un puissant champ magnétique, elle projette alors le long de son axe magnétique un mince pinceau de radiations, et un observateur placé approximativement dans la direction de cet axe observera une émission pulsée par un effet de phare, appelée pour cette raison pulsar. Par contre, si elle n’est ni associée à un compagnon, ni entourée de matière circumstellaire, ou qu’elle n’a pas développé une émission pulsée, une étoile à neutrons est extrêmement difficile à détecter car seule l’émission thermique de sa surface est éventuellement décelable. De plus une étoile à neutron a un diamètre d’une dizaine de kilomètres seulement (pour une masse d’environ 3 milliard de tonnes !), ce qui en fait un des astres les plus petits de l’univers (hormis les trous noirs).

Très vite, de nombreuses recherches de cet astre résiduel ont été entreprises. Elles se sont toutes avérées négatives, que ce soit par des calculs de bilan énergétiques basés sur les observations, par la quête de pulses en utilisant des techniques de photométrie rapide, ou par de l’imagerie directe à toutes les longueurs d’onde. Pour expliquer ce manque de détection, les astronomes ont émis plusieurs hypothèses : les poussières environnantes masqueraient l’étoile à neutron ; la force du champ magnétique ne serait pas suffisante pour avoir formé un pulsar ; il y aurait bien un pulsar, mais le faisceau énergétique n’est pas dirigé dans notre direction…

 

Le JWST a enfin levé le voile :  la théorie indiquant que les photons ionisants émis par une étoile à neutron doivent exciter les raies d’émission des éléments lourds qui sont dans l’éjecta, il s’agit donc de rechercher ces émissions. Pour cela, l’équipe qui conduit cette recherche a analysé les données du MRS et de NIRSpec. La présence de raies fortement ionisées a été identifiée grâce à ces deux instruments. Elles sont dues en particulier à la présence d’argon et de souffre, qui sont justement des éléments produits par la combustion nucléaire de l’oxygène et du silicium. Ces raies en émission avaient déjà été détecté mais avec des résolutions (angulaire et spectrale) trop insuffisantes pour permettre de savoir si l’émission provenait des éjecta ou de l’anneau équatorial. Les observations du JWST ont prouvé sans ambigüité possible que l’émission provient d’une source centrale séparée de l’anneau, et qu’il ne s’agit pas d’une lumière diffusée par celui-ci.

Les raies étroites qui ont été observées ne peuvent être excitées que par une source de photons ionisants ou par une onde de choc. Les sources potentielles pourraient être : (1) des photons d’une nébuleuse de vent de pulsar (PWN, pour Pulsar Wind Nebula) générée par une étoile à neutron, (2) des photons qui proviennent directement d’une étoile à neutron qui se refroidit, (3) une accrétion sur un objet compact, ou (4) des chocs dans une nébuleuse de vent de pulsar. D’autres possibilités ont été envisagées, mais ont été écartées pour diverses raisons.

Quoiqu’il en soit, toutes les explications envisageables impliquent la présence d’une jeune étoile à neutron, ou d’un trou noir, au centre des éjectas. L’hypothèse du trou noir a été écartée parce que le progéniteur de SN 1987A avait une masse trop faible (inférieure à 20 masse solaire), tout comme le cœur de fer (qui avait aussi une masse inférieure à 2 masse solaire).

Il s’agit là d’une découverte majeure faite grâce aux observations réalisées par les instruments du JWST (voir l’article de Fransson et al.). Elle a d’ailleurs justifié d’un communiqué de presse émis par la Revue Science, et repris par la NASA et de très nombreux instituts.

 

Combinaison d’une image du télescope spatial Hubble de SN 1987A et de la source d’argon compacte. La source bleue faible au centre est l’émission de la source compacte détectée avec l’instrument JWST/NIRSpec. Autour de cette source, on aperçoit les débris stellaires, contenant la plupart de la masse, s’étendant à des milliers de km/seconde. La « chaîne de perles » intérieure brillante est le gaz des couches externes de l’étoile qui a été expulsé environ 20 000 ans avant l’évènement final. Les débris rapides entrent maintenant en collision avec l’anneau, ce qui explique les points lumineux.
En dehors de l’anneau intérieur se trouvent deux anneaux extérieurs, vraisemblablement produits par le même processus que celui qui a formé l’anneau intérieur. Les étoiles brillantes à la droite et à la droite de l’anneau intérieur ne sont pas liées à la supernova.

Note : il est coutume, dans l’immense majorité des articles traitant de supernovae, d’utiliser le terme “explosion” pour marquer l’évènement. Ce terme est impropre et prête à une grave confusion. Le mécanisme en jeu dans une supernova comme SN 1987A (dite de Type II), est le résultat d’un effondrement des couches extérieures sur le cœur de l’étoile, puis le collapse du cœur sur lui-même (composé essentiellement de fer). La matière qui s’effondre rebondit alors sur ce noyau dur. Elle est alors expulsée par une puissante onde de choc. C’est ce qui produit le phénomène observé. Il ne s’agit donc en aucun cas d’une “explosion”, puisqu’il s’agit d’une “implosion” initiale. Par contre, une supernova de Type Ia résulte d’une explosion d’une étoile dans un système multiple.

JWST